Sauf précision, tous les passages tirés des Saintes Écritures sont extraits de la Version Ostervald révisée édition de 1996.
Psaume 110:1
« L'Éternel a dit à mon Seigneur: Assieds-toi à ma droite, jusqu'à ce que j'aie fait de tes ennemis le marchepied de tes pieds. »
Les commentateurs trinitaires émettent souvent l’opinion selon lequel « mon Seigneur » serait une traduction, dans ce verset, du mot hébreu adonai, un autre titre donné à Dieu. Il affirme qu’il s’agirait donc d’une preuve de la divinité du Messie. Non seulement ce n’est pas un argument valide, mais ce passage est, en fait, une des plus grandes preuves de la distinction qui existe entre le Messie et Dieu. Le mot hébreu traduit par « mon Seigneur » est adoni (se prononçant différemment du mot « adonai ») dans les textes hébreux standards. Ce terme est toujours utilisé dans la Bible pour désigner des maîtres et des seigneurs humains, il n’est jamais utilisé pour Dieu. Malheureusement, la plupart des concordances et des lexiques hébreux ne donne que la racine des mots et non pas le mot que l’on retrouve de fait dans le texte hébreu. C’est la raison pour laquelle les recherches bibliques effectués par des personnes utilisant des outils tel que la Strong’s Concordance seront toujours limitées. Bien que cela n’affecte généralement pas l’interprétation du texte, dans certain cas, ce problème peut se révéler essentiel à la bonne compréhension d’un passage biblique, comme cela est le cas pour Psaume 110:1.
Dans ce Psaume, la Bible donne au Messie un titre qui en fait ne décrit jamais Dieu. Le mot est adoni et, ainsi qu’il est utilisé à 195 reprises dans l’Ancien Testament, il désigne un individu de rang supérieur, soit un humain, soit en certaines occasions, un ange - un être crée - et non pas Dieu. Le Psaume 110:1 démontre ainsi bien que le Messie n’est pas Dieu, mais un être suprêmement exalté par Dieu.
La différence entre adon (la racine du mot), adoni (« seigneur », toujours utilisé pour désigner des hommes ou des anges) et adonai (qui désigne Dieu) est essentiel à saisir si l’on veut bien comprendre Psaume 110:1.
1. Référence à des hommes: mon seigneur, mon maître: [adoni]
(a) maître: Exode 21:5; Genèse 24:12 (Version Annotée Neuchâtel); Genèse 44:5 (Version Annotée Neuchâtel); 1 Samuel 30:13 et 15; 2 Rois 5:3 (Version Annotée Neuchâtel), 20 et 22;
(b) mari: Genèse 18:2 (La Bible du Semeur);
(c) prophète: 1 Rois 18:7 et 13; 2 Rois 2:19; 2 Rois 4:16 et 28; 2 Rois 6:5; 2 Rois 8:5;
(d) prince: Genèse 42:10; Genèse 23:6, 11 et 15; Genèse 43:20; Genèse 44:18; Genèse 47:18; Juges 4:18;
(e) roi: 1 Samuel 22:12;
(f) père: Genèse 31:5;
(g) Moïse: Exode 32:22; Nombres 11:28; Nombres 12:11; Nombres 32:26 et 27; Nombres 36:2;
(h) prêtre: 1 Samuel 1:15 et 26;
(i) ange théophanique [un ange représentant Dieu]: Josué 5:14; Juges 6:13;
(j) chef militaire: 2 Samuel 11:11;
(k) référence général à une certaine forme de supériorité ou d’autorité: Genèse 24:18; Genèse 32:5; Genèse 33:8; Genèse 44:7; Ruth 2:13; 1 Samuel 25:24.
2. Référence à Dieu: [adonai].
Notez bien que lorsque le mot fait référence à Dieu, il change et adopte une forme différente que lorsqu’il fait référence à des hommes. La voyelle après le « n » (la seconde lettre en partant de la gauche) a changée.
Nous pouvons donc voir qu’adoni et adonai ont la même racine, adon - ce mot étant celui qui est listé dans les concordances et la plupart des lexiques. Néanmoins, le mot exact utilisé est différent. Adoni, le mot que l’on retrouve en Psaume 110:1, n’est jamais utilisé pour Dieu. Il est toujours utilisé pour un homme ou un ange occupant un rang supérieur. Que le terme adoni soit utilisé dans le texte hébreu pour désigner le Messie en Psaume 110 est une preuve majeure que le Messie n’est pas Dieu. Si le Messie avait dû être Dieu, alors le mot adonai aurait été utilisé. La forme ADONI (« mon seigneur »), un titre de royauté (1 Samuel 29:8), doit être clairement différenciée du titre divin ADONAI (« mon Seigneur ») tel qu’il est utilisé pour Yahvé.
Il y a de nombreux cas où l’utilisation du terme adonai fait référence à des anges ou à des hommes, leur conférant ainsi un statut élevé, mais nulle part il n’est indiqué que la personne qui s’exprime croit qu’elle s’adresse alors à Dieu. Cela est lié à l’utilisation même de la langue hébraïque en général. L’étude de mots tel qu’Élohim démontre que ce mot est aussi utilisé de façon occasionnelle pour désigner des êtres humains occupant une position hiérarchique élevé. Les exemples bibliques où le terme adonai est utilisé pour désigner des êtres humains sont, entre autres, Genèse 19:18, Genèse 24:9 et Genèse 39:2. Par contraste avec l’utilisation d’adonai pour désigner de façon occasionnelle des êtres humains, il n’y a pas une seule fois où le mot adoni est utilisé pour désigner Dieu. Des hommes peuvent être exaltés, mais jamais Dieu n’est rabaissé à un rang subalterne.
Les 148 versets suivants contiennent 166 utilisations du mot [adoni].Chacune de ces utilisations fait référence à un seigneur humain ou bien à un ange. Pas une seule fois ce mot n’est utilisé en référence à Dieu:
Genèse 23:6, 11 et 15; Genèse 24:12 (2 fois), 14, 18, 27 (3 fois), 35, 36, 37, 39, 42, 44, 48 (2 fois), 49, 65; Genèse 31: 35; Genèse 33:8, 13, 14 (2 fois), 15; Genèse 39:8; Genèse 42: 10; Genèse 43:20; Genèse 44:5, 7, 18 (2 fois), 19, 20, 22, 24; Genèse 47: 18 (2 fois), 25; Exode 21: 5; Exode 32:22; Nombres 11:28; Nombres 12:11; Nombres 32:25, 27; Nombres 36:2; Josué 5:14; Josué 10:1, 3; Juges 1:5, 6, 7; Juges 4: 18; Juges 6: 13; Ruth 2: 13; 1 Samuel 1: 15, 26 (2 fois); 1 Samuel 22:12; 1 Samuel 24: 8; 1 Samuel 25: 24, 25 (2 fois), 26 (2 fois), 27, 28, 29, 31, 41; 1 Samuel 26: 17, 18, 19; 1 Samuel 29: 8; 1 Samuel 30: 13, 15; 2 Samuel 1: 10; 2 Samuel 3: 21; 2 Samuel 9: 11; 2 Samuel 11: 11; 2 Samuel 13: 32, 33; 2 Samuel 14: 9, 12, 15, 17 (2 fois), 18, 19 (2 fois), 22; 2 Samuel 15: 15, 21 (2 fois); 2 Samuel 16: 4, 9; 2 Samuel 18: 31, 32; 2 Samuel 19: 19 (2 fois), 20, 26, 27, 30, 35, 37; 2 Samuel 24: 3, 21, 22; 1 Rois 1: 13, 17, 18, 20 (2 fois), 21, 24, 27 (2 fois), 31, 36, 37 (2 fois); 1 Rois 2: 38; 3: 17, 26; 18: 7, 10; 1 Rois 20: 4; 2 Rois 2: 19; 2 Rois 4: 16, 28; 2 Rois 5: 3, 18, 20, 22; 2 Rois 6: 5, 12, 15, 26; 2 Rois 8: 5, 12; 2 Rois 10: 9; 2 Rois 18: 23, 24, 27; 1 Chroniques 21: 3 (2 fois), 23; 2 Chroniques 2: 14, 15; Ésaïe 36: 8, 9, 12; Jérémie 37: 20; Jérémie 38: 9; Daniel 1: 10; Daniel 10: 16, 17 (2 fois), 19; Zacharie 1: 9; Zacharie 4: 4, 5, 13; Zacharie 6: 4.
Les 24 versets suivants contiennent l’expression [l’adoni], « à mon Seigneur ». Alors qu’en français on séparera la préposition du nom ou du verbe qui suit, en hébreu, la préposition est directement rattachée au mot. Genèse 24: 3, 54, 56; Genèse 32: 5, 6, 19; Genèse 44: 9, 16, 33; 1 Samuel 24: 7; 1 Samuel 25: 27, 28, 30, 31; 2 Samuel 4: 8; 2 Samuel 19: 29; 1 Rois 1: 2; 1 Rois 18: 13; 1 Rois 20: 9; 1 Chroniques 21: 3; Psaume 110: 1. Tout ces versets font référence à des seigneurs humains et non pas à Dieu.
Les 6 versets suivants contiennent l’expression suivante [v’adoni]: Genèse 18: 12; Nombres 36: 2; 2 Samuel 11: 11; 2 Samuel 14: 20; 2 Samuel 19: 28; 2 Samuel 24: 3.
La référence suivante contient l’expression suivante [m_adoni]: Genèse 47: 18.
Ceux qui étudient l’hébreu savent que le texte biblique original fut écrit sans ponctuation; c’est-à-dire, qu’il ne possède ni points, ni virgules et ne possède également nulles marques indiquant la présence de voyelles. Ainsi certains spécialistes du texte biblique pourraient avancer l’idée que puisque les marques signifiant la présence de telles ou telles voyelles ont été ajoutées bien plus tard dans les manuscrits hébreux, il est alors fort possible que les rabbins aient pu commettre une erreur dans le contexte bien précis de ce passage des Psaumes. Il est cependant important de noter que bien que les deux mots hébreux adonai et adoni s’écrivent de la même façon, ils se prononcent différemment. La tradition orale juive a certainement permis de déterminer quelles voyelles devaient être placées en telle ou telle endroit. Ainsi, lorsque des signes identifiant la présence de telle ou telle voyelle furent ajoutés aux manuscrits hébraïques, ils le furent en fonction de la façon dont le texte avait toujours prononcé.
Que les Juifs aient toujours pensé au Messie comme devant être un homme - et non pas Dieu fait chair - est mis en évidence par le texte grec - à la fois dans la Septante et dans les citations du Nouveau Testament. Il est important de se souvenir que la Septante, la traduction grecque de l’Ancien Testament hébreu, fut réalisée autour de 250 av. J.-C., bien avant que n’ait vu jour le débat autour de la Trinité. La Septante va tout à fait dans le sens de l’idée selon laquelle le Psaume 110: 1 fait référence à un homme, une créature de Dieu, comme étant, dans ce contexte, le Seigneur. Il ne s’agit, dans ce cas, pas de Dieu. Adoni est rendu en grec par ho kurios mou, « mon seigneur ».
Le Nouveau Testament, lorsqu’il cite Psaume 110: 1, rend l’adoni par « à mon seigneur » (to kurio mou). Par contraste, adonai ([Psaume 110] verset 5 et très souvent à d’autre endroit) est rendu par « le Seigneur » (kurios). Ceci prouve que la différence entre adonai et adoni était reconnue et reproduite en grec bien avant que les points indiquant les voyelles dans le texte massorétique ne fixent par écrit l’ancienne tradition orale de façon permanente.
Il est intéressant de noter que les exégètes bibliques n’ont souvent pas fait attention au texte de Psaume 110, ainsi qu’aux endroits où ce passage est cité dans le Nouveau Testament. Ils ont décrété que ce texte confirmait ce qu’il croyait être la Divinité de Christ. Cependant, c’est ne pas prêter attention à la formulation exacte du texte hébreu.
Ainsi de la même façon, les trinitaires, en attribuant à Pierre, en Actes 2: 36, l’extraordinaire assertion selon laquelle « Dieu a fait Jésus JÉHOVAH », semble avoir négligé le fait selon lequel kurion (« Seigneur ») fait référence à to kurio mou (« mon Seigneur ») au verset 34, qui est une citation tiré de Psaume 110: 1. Dans ce passage des Psaumes, le mot hébreu correspondant n’est pas Jéhovah mais adon - le mot utilisé couramment pour « seigneur » ou « maître ». Le sens que Pierre veut donner à cette citation extraite de l’Ancien Testament est illustré par le langage qu’il emploie en d’autres endroits; voir Actes 5: 31 [où Pierre appelle Jésus un « Prince », etc.].
En Psaume 110, le mot est utilisé pour désigner un « seigneur » ou un « maître » et non pas pour désigner Dieu. Ainsi Psaume 110: 1 offre une claire évidence que le Messie de Dieu espéré par les Hébreux ne devait pas être Dieu lui-même, mais une créature de Dieu. Les Juifs écoutant Pierre au jour de la Pentecôte comprenaient très certainement qu’ainsi Pierre confirmait l’idée selon laquelle Jésus était un « homme approuvé de Dieu » (verset 22 - version Darby) et également un être créé- voir le « mon seigneur » de Psaume 110: 1 cité par Pierre juste un peu plus loin (verset 34). L’utilisation d’adoni dans le verset 1 du Psaume 110 démontre de façon claire que les Juifs n’espéraient pas de leur Messie qu’il soit Dieu. Ils espéraient au contraire qu’il s’agirait d’un « seigneur » qui soit une créature de Dieu.